L’exception d’inexécution est un mécanisme bien connu du droit des contrats, mais qui n’était pas directement régi par les dispositions du Code civil. L’ordonnance corrige cette lacune en lui consacrant deux articles.
Articles en vigueur au 1er octobre 2016 | Articles abrogés le 1er octobre 2016 |
Art. 1219.- Une partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave. | |
Art. 1220.- Une partie peut suspendre l’exécution de son obligation dès lors qu’il est manifeste que son cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et que les conséquences de cette inexécution sont suffisamment graves pour elle. Cette suspension doit être notifiée dans les meilleurs délais. |
Définition de l’exception d’inexécution (art. 1219). L’exception d’inexécution est une mesure comminatoire qui consiste, pour une partie, à suspendre l’exécution de son obligation jusqu’à ce que l’autre partie exécute la sienne. Pour qu’une partie puisse valablement refuser d’exécuter son obligation alors que celle-ci est exigible, il faut que l’autre partie n’ait pas exécuté « la sienne ». Cette dernière expression suggère qu’il doit exister une certaine réciprocité entre l’obligation inexécutée et l’obligation pour laquelle l’exception d’inexécution est opposée. Le texte ajoute une condition supplémentaire : l’inexécution doit être suffisamment grave. Le rapport remis au Président de la République suggère que la gravité de l’inexécution doit être appréciée de façon relative en procédant à un contrôle de proportionnalité entre la gravité de l’inexécution et l’importance de l’obligation que l’autre partie refuse d’exécuter en représailles.
L’exception d’inexécution est également possible en réaction à un simple risque d’inexécution (art. 1220). Le texte pose des conditions relativement strictes à cette possibilité : il doit être « manifeste » que le cocontractant ne s’exécutera pas à l’échéance et les conséquences de cette inexécution doivent être « suffisamment graves » (ce qui suggère, là aussi, un contrôle de proportionnalité). Par ailleurs l’exception d’inexécution n’est valable, en cas de simple risque d’inexécution, que si elle est notifiée dans les meilleurs délais au cocontractant.
Cette extension de l’exception d’inexécution au simple risque d’inexécution est présentée par le rapport remis au Président de la République comme une nouveauté. Il n’est pourtant pas certain que la jurisprudence antérieure fût hostile à cette hypothèse[1] et il existe par ailleurs divers textes spéciaux antérieurs à la réforme qui reconnaissent une telle possibilité[2].
Pour aller plus loin
(Bibliographie non exhaustive)
- V. les références bibliographiques indiquées dans la page de présentation de la Section 5 : « L’inexécution du contrat ».
Notes de bas de page
[1] Cass. com., 11 févr. 2003, n° 00-11.085 : « Mais attendu, en premier lieu, que l’arrêt relève que le moyen de la société Diringer a trait à l’existence d’une « contre-créance » qui l’autoriserait à suspendre l’exécution de son obligation de paiement et que l’exception d’inexécution a pour objet de contraindre l’un des cocontractants à exécuter ses propres obligations ou de prévenir un dommage imminent, tel qu’un risque caractérisé d’inexécution ; qu’ainsi, sans méconnaître les termes du litige, la cour d’appel, qui s’est fondée sur une exception d’inexécution, a légalement justifié sa décision ».
[2] Art. 1613 et 1653 du Code civil.