Présentation de l'article 1128 de la nouvelle section 2 « La validité du contrat »

Publié par Clément François

ATER à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne
IEJ Jean Domat

L’ancien article 1108 énumérait les conditions générales de validité des conventions. Le nouvel article 1128 remplit la même fonction, mais l’énumération évolue pour refléter les modifications des conditions de validité opérées par l’ordonnance. Le consentement des parties et leur capacité de contracter sont toujours des conditions de validité du contrat. En revanche, les notions d’objet et de cause du contrat sont remplacées par la notion de contenu du contrat. Ce dernier doit donc être licite et certain.

Articles en vigueur au 1er octobre 2016 Articles abrogés le 1er octobre 2016
Art. 1128.- Sont nécessaires à la validité d’un contrat :

1° Le consentement des parties ;

2° Leur capacité de contracter ;

3° Un contenu licite et certain.

Art. 1108.- Quatre conditions sont essentielles pour la validité d’une convention :

Le consentement de la partie qui s’oblige ;

Sa capacité de contracter ;

Un objet certain qui forme la matière de l’engagement ;

Une cause licite dans l’obligation.

La disparition de la cause. La notion de cause, qui était traitée aux anciens articles 1131 et suivants, a connu des développements considérables grâce à – ou à cause de, c’est selon le point de vue – la jurisprudence et la doctrine. La notion de cause a ainsi été subdivisée en deux notions faisant chacune l’objet d’un régime spécifique.

La cause objective tout d’abord, aussi appelée cause de l’obligation, correspond au but immédiat (causa proxima) et abstrait du contrat. Elle est, pour un type de contrat donné, invariable. Ainsi, dans les contrats synallagmatiques, les obligations des parties se servent mutuellement de cause. Dans le contrat de vente, l’acheteur s’engage à payer le prix de vente parce que le vendeur s’engage à lui transférer la propriété du bien vendu, et vice versa.

La cause subjective ensuite, aussi appelée cause du contrat, est le mobile personnel qui a déterminé le consentement de chaque partie. La cause subjective est donc propre à chaque partie, c’est le but lointain (causa remotae) que chaque partie attribue au contrat. Ainsi, la cause subjective d’un contrat de vente d’un immeuble peut être, pour l’acquéreur, l’occupation personnelle du bien acheté en y installant un fonds de commerce, ou encore la mise en location du bien pour le faire fructifier.

La notion de cause a fait l’objet d’une jurisprudence byzantine, pour ne pas dire sibylline. Certains arrêts ont même paru entamer un mouvement de subjectivisation de la cause de l’obligation, c’est-à-dire de la cause objective, complexifiant davantage encore la notion. Inutilement complexe pour certains, fruit du génie juridique français pour d’autres, la loi d’habilitation a finalement tranché en faveur de la suppression de la notion. « Face à la difficulté de donner à la notion de cause une définition précise, qui en engloberait tous les aspects, face aux critiques dont elle est l’objet tant de la part d’une partie de la doctrine que de la pratique, qui la perçoit comme un facteur d’insécurité juridique et un frein à l’attractivité de notre droit, il a été fait le choix de ne pas recourir à cette notion, pour la remplacer par des règles aux contours mieux définis, permettant au juge de parvenir aux mêmes effets, tout en évitant le contentieux abondant que suscite cette notion. »[1] Le fait que la notion de cause soit inconnue des droits étrangers et des différents projets européens de codification est également mis en avant dans le rapport du Gouvernement pour justifier la suppression de la notion.

Pour autant, et c’est ce paradoxe que ne manquent pas de critiquer les auteurs qui étaient favorables au maintien de la notion de cause, l’ordonnance s’est attachée à maintenir les fonctions de la cause. « L’apport de la réforme sur ce point consiste donc dans la suppression de la référence à la cause, tout en consolidant dans la loi toutes les fonctions que la jurisprudence lui avait assignées. »[2] Ce sont les nouvelles notions de contenu et de but du contrat qui ont vocation à accueillir les fonctions qui étaient jusqu’à alors attribuées à la cause, ainsi que nous le verrons dans les pages suivantes.

Pour aller plus loin

(Bibliographie non exhaustive)

  • F. Chénedé, « La cause est morte… vive la cause ? », Contrats, conc. consom. 2016, dossier 4 (n° 5, p. 21).
  • G. Wicker, « La suppression de la cause et les solutions alternatives (Rapport français) », La réforme du droit des obligations en France, 5e journées franco-allemandes, dir. R. Schulze et alii, Société de législation comparée, 2015, p. 107.
  • M.-Ph. Weller, « ’La cause’ dans le projet d’ordonnance portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations de 2015 (Commentaire allemand) », La réforme du droit des obligations en France, 5e journées franco-allemandes, dir. R. Schulze et alii, Société de législation comparée, 2015, p. 139.

Notes de bas de page

[1] Rapport remis au Président de la République.

[2] Rapport remis au Président de la République.

Comment citer cet article ?

C. François, « Présentation de l'article 1128 de la nouvelle section 2 “La validité du contrat” », La réforme du droit des contrats présentée par l'IEJ de Paris 1, https:/​/​iej.univ-paris1.fr/​openaccess/​reforme-contrats/​titre3/​stitre1/​chap2/​sect2/​ [consulté le 28/03/2019].

Article publié le 30/05/2016.
Dernière mise à jour le 30/05/2016.